Benoît Duteurtre, L’été 76, Jean-Claude Perrier, Livre Hebdo, 18 mars 2011

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Dans la veine des Pieds dans l’eau, Benoît Duteurtre romance l’été de ses quinze ans.

 

Quoique son narrateur, son double, «foreveryoung» Benoît, avec ses cheveux en bataille, ses taches de rousseur et ses dents du bonheur, s’éclate plutôt sur Led Zep, se pâme sur Debussy, puis, non sans snobisme, se tourne vers la musique d’avant garde, L’été 76 évoque plutôt l’atmosphère d’une chanson de Michel Delpech, Nos quinze ans. II y est même question de Mobylette, ou de Solex que Duteurtre, dans un joli cuir a la Cottard, qualifie, quelque part, de «pétoires ». Le roman, lui, qui fait un peu suite aux livres épatants consacrés par Duteurtre a sa famille (descendant par les femmes du président Coty) et à son enfance sous le général de Gaulle (Benoît est ne en 1960), commence, en fait, en 1975, sous Giscard. Ses parents, bons bourgeois cathos mais « de gauche », un peu inquiets devant révolution et le look de l’aîné de leur progéniture, ont décidé de mettre Benoît au lycée Saint Joseph du Havre afin qu’il ait une chance de répondre à leurs attentes (sa mère surtout) : devenir médecin de campagne. II est vrai que l’adolescent, un chouia baba et romantique, aime bien la nature, notamment celle des Vosges – d’où est originaire une autre partie de la famille. II y passe des vacances et l’évoque magnifiquement. Tout comme il arrive à trouver de la beauté à sa ville natale, réputée plutôt ingrate, et à nous la faire partager.

En ce temps la, Benoît n’était pas tout a fait un garçon comme les autres II s’intéressait avant tout à la musique, à la peinture et à la poésie. Au point d’en composer des recueils II ose même faire lire le premier, Les cauchemars rêveurs, à l’académicien Goncourt Armand Salacrou, un « pays », qui se montrera aimable et encourageant. On l’aura compris, notre nouveau Rastignac rêve de « monter » à la capitale (via Rouen), pour devenir artiste. Et papa maman – qui, afin d’être dans le vent, ont entrepris entre temps une psychanalyse – accepteront sans trop regimber cette vocation. Et les filles, dans tout ça ? Certes le sujet préoccupe notre ami. II rencontre Hélène une extrême gauchiste plus mûre que lui. Elle lui plaît, mais en tout platonisme. D’abord elle sort avec Philippe et puis Benoît apprécie surtout leurs débats d’idées. II y aura bien une Sylvie avec qui il jettera sa gourme sur les galets de la plage, mais sans grand enthousiasme. II avoue préférer les beaux yeux de son ami Vincent qui, lui, veut devenir peintre. On sait que Benoît Duteurtre a réussi, plutôt bien, dans son rêve de jeunesse il est devenu un écrivain qui compte. En revanche on l’imagine mal en punk ! C’est peut être cette période, ses débuts à Pans, qu’il nous racontera la prochaine fois avec, forcement, le même charme et la même nostalgie légère.

J.-C. P.

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